Violence basée sur le genre à l'école : une étude de cas à Kribi révélant de nouvelles pistes de réflexion
L'étude de Linda Silim Moundene sur la violence basée sur le genre dans les écoles de Kribi, au Cameroun, vient bousculer nos représentations. En s'appuyant sur une méthodologie rigoureuse et en adoptant un regard critique sur les données existantes, l'auteure nous livre des résultats surprenants qui appellent à une profonde réflexion sur les mécanismes de cette violence et sur les stratégies de prévention à mettre en œuvre.
Une méthodologie innovante
L'une des forces de cette étude réside dans sa méthodologie mixte, combinant enquêtes quantitatives et qualitatives. En interrogeant 354 élèves issus de différents établissements scolaires, l'auteure a pu recueillir une masse importante de données sur les formes de violence subies, les acteurs impliqués et les contextes dans lesquels elles se produisent. Parallèlement, des entretiens approfondis avec des enseignants, des élèves et des acteurs locaux ont permis de mieux comprendre les ressorts de ces violences et les perceptions qu'en ont les différents acteurs.
Des résultats surprenants
Les résultats de l'étude de Linda Silim Moundene révèlent une complexité des violences scolaires souvent méconnue. Au-delà des agressions physiques et sexuelles, les violences psychologiques, telles que les moqueries, les insultes et les humiliations, sont omniprésentes. Ces violences, souvent banalisées, ont un impact profond sur le bien-être psychologique des élèves, affectant leur estime de soi, leur confiance en l'avenir et leurs performances scolaires. Par ailleurs, l'étude souligne le rôle des normes de genre dans la reproduction de ces violences. Les filles, en particulier, sont victimes de stéréotypes sexistes qui les rendent plus vulnérables aux harcèlement et aux agressions sexuelles. Ces violences, loin d'être des actes isolés, s'inscrivent dans un système plus large d'inégalités sociales et de pouvoir.
Les résultats de cette étude sont riches d'enseignements. Au-delà des violences physiques et sexuelles souvent évoquées, l'étude met en évidence l'importance des violences psychologiques et des micro-agressions au quotidien. De plus, elle souligne le rôle central joué par l'environnement scolaire dans la reproduction des inégalités de genre et dans la banalisation de la violence.
Un autre résultat marquant concerne la territorialité des systèmes de prévention. Les dispositifs mis en place à l'échelle locale, bien que nombreux, souffrent d'une coordination insuffisante et d'une adaptation limitée au contexte spécifique de Kribi. Les données collectées par les ONG internationales, bien que précieuses, ne prennent pas toujours en compte les spécificités culturelles et sociales du Cameroun, ce qui limite leur pertinence pour l'élaboration de politiques publiques adaptées.
Les enjeux de la collecte et de l'analyse des données
Cette étude met en évidence la nécessité de développer des outils de collecte et d'analyse de données adaptés aux contextes locaux. Les récits des victimes, souvent complexes et nuancés, doivent être pris en compte dans toute leur diversité. De plus, il est essentiel de s'appuyer sur des méthodes qualitatives pour comprendre les mécanismes sous-jacents à la violence basée sur le genre.
Vers de nouvelles perspectives
Les travaux de Linda Silim Moundene ouvrent de nouvelles perspectives pour la recherche et l'action. En s'intéressant aux interactions entre les différents niveaux d'analyse (micro, méso et macro), l'auteure souligne la nécessité d'adopter une approche systémique pour lutter contre la violence basée sur le genre.
Quelques pistes de réflexion :
- Le rôle de l'éducation : Comment sensibiliser les élèves, les enseignants et les parents aux questions de genre et de consentement ?
- La coopération interinstitutionnelle : Comment renforcer la coordination entre les différents acteurs impliqués dans la lutte contre la violence basée sur le genre ?
- L'implication des communautés : Comment impliquer les communautés locales dans la conception et la mise en œuvre des stratégies de prévention ?
- La production de données locales : Comment renforcer les capacités des acteurs locaux à collecter et à analyser des données pertinentes pour informer les politiques publiques ?
Cette étude est une contribution essentielle à la compréhension de la violence basée sur le genre dans les écoles camerounaises. Elle nous invite à repenser nos approches et à développer des stratégies de prévention plus efficaces et plus adaptées aux contextes locaux.
Linda Silim Moundene est fondatrice de L'Étudiant Africain et doctorante à Howard University.
https://www.linkedin.com/in/linda-silim-moundene-b90a681bb/
Mots-clés : violence basée sur le genre, école, Cameroun, méthodologie mixte, analyse de données, prévention, genre, inégalités.
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